mardi 16 juillet 2013

Pitcairn, l'île des révoltés de la Bounty


Par : Armelle.

 


Pourquoi faire escale à Pitcairn, nous direz-vous ? Cette île minuscule, sans plage, ni baie abritée, encerclée de hautes falaises exposées aux vents dominants et à la houle, avec un unique village de 50 habitants. Une île qui ne se trouve qu’à quelques jours de mer d’un joli archipel doté de lagons, de plages, de coraux et de bons mouillages (les Gambier).

Et bien parce-que Pitcairn à une histoire particulière, liée à ses habitants.

Laissez-moi vous la raconter, si vous ne la connaissez déjà, et vous comprendrez sans aucun doute notre obstination :
 
En 1787 la couronne d’Angleterre fait armer un navire du nom de la Bounty pour un long voyage vers Tahiti puis retour vers les Caraïbes, avec pour mission de rapporter des pousses d’arbres à pain. Ceci dans le but de fournir de la nourriture à bon marché pour les esclaves des colonies anglaises implantées dans les îles caribéennes. Le commandement est confié au capitaine Bligh. A son bord se trouve également Fletcher Christian, premier lieutenant et ami du capitaine. Leur amitié part vite en fumée après quelques semaines en mer. Fletcher Christian est en complet désaccord avec les méthodes disciplinaires du capitaine, qu’il juge cruelles et démesurées. L’équipage arrive épuisé à Tahiti et y séjourne plusieurs mois, avant de repartir les cales chargées de jeunes pousses d’arbre à pain. Ils auront reçu un accueil très chaleureux de la part des tahitiens et beaucoup de marins se liront avec des femmes. Fletcher Christian entre autre, n’échappera pas à leur charme et tombera amoureux de Maimiti, la fille du roi. Dès leur départ les humiliations et punitions sévères du capitaine reprennent. Le contraste avec la douceur de vivre Tahitienne est énorme, la mutinerie éclate après seulement deux semaines de mer. Fletcher Christian en prend le commandement. Le capitaine Bligh et la plupart de ses hommes sont débarqués dans la chaloupe, 19 au total qui, après 5 mois de navigation, parviendront à rejoindre l’île de Timor. Quant à La Bounty, celle-ci fait demi-tour en direction de Tahiti. Elle y séjournera quelques temps avant d’en repartir avec 9 mutins et des Tahitiens, hommes et femmes, dans le but de trouver une île isolée, voir inconnue ou jamais aucun navire du royaume d’Angleterre ne viendra reprendre les mutins pour les juger. En effet s’ils sont repris, pour eux, c’est la peine capitale. Leur odyssée les mènera jusqu’à Pitcairn, une île dotée de tout ce qu’il faut pour vivre (eau, fruits et légumes en abondance), une île de surcroît jamais visitée car très difficile à aborder. Enfin les cartes de l’époque sont fausses, Carteret s’est trompé de 150 milles en longitude dans son relevé, lors de sa découverte en 1767. L’île est parfaite pour une communauté qui désire ne jamais être retrouvée.

Ils bâtiront ici un petit havre de paix à l’abri de toute visibilité depuis la mer. La Bounty sera échouée sur les récifs et brûlée. Des enfants viennent rapidement remplir les maisons. Chacun s’emploie à subvenir à ses besoins par diverses récoltes. Malheureusement ils ont commis une grave erreur : leur petite communauté comprend plus d’hommes que de femmes. Des tensions vont vite apparaitre et peu à peu s’envenimer jusqu’à de graves querelles se concluant par des bains de sang, au cours desquels Fletcher Christian et bien d’autres hommes trouveront la mort. En 1820 lorsqu’un baleinier américain fait relâche sur l’île de Pitcairn, c’est le premier depuis la Bounty. Il ne reste plus qu’un seul homme, John Adams, vivant au milieu d’une vingtaine de femmes et d’enfants. Il finira par raconter l’histoire des révoltés de la Bounty, dont le sort fut demeuré inconnu jusqu’alors.

Cette histoire eut un retentissement dans le monde entier. Car en effet à l’époque de la mutinerie de la Bounty un courant humaniste remettait en cause l’ordre établi aboutissant entre autres à une révision du Code Maritime et surtout en France à la Révolution de 1789 et la Déclaration des Droits de l’Homme.

En faisant escale à Pitcairn nous voulions revivre cette épopée, naviguer dans le sillage de la Bounty et venir à la rencontre des descendants des mutins.
 
Arrivée sous spi à Pitcairn

Aujourd’hui les habitants de Pitcairn se prénomment tous Christian, Young, MacCoy, ou Adams. A peu d’exception près ils sont tous descendants des mutins de la Bounty. Ils parlent un dialecte mi anglais mi polynésien et subsistent grâce aux ravitaillements trimestriels d’un cargo néo-zélandais.

L’île n’a reçu aucune visite depuis un mois et aujourd’hui nous sommes deux bateaux à arriver le même jour et à mouiller dans la célèbre baie de la Bounty, à seulement quelques mètres des restes de son épave. Tikaï, un bateau français de 21m que nous avions rencontré aux Galápagos, vient faire escale ici pour une mission scientifique.
 

Mouillage dans la baie de la Bounty.
L'épave se trouve à quelques mètres derrière, au niveau des  roches.
 
Nous décidons de débarquer ensemble et par nos propres moyens… La manœuvre s’avèrera plus que délicate : ‘Attention surtout ne pas regarder derrière soit et foncer entre deux vagues en opérant un brusque virage à gauche juste devant les roches, pour venir s’abriter derrière le petit môle. Waouh ! Impressionnant quand on regarde la déferlante qui vient aussitôt refermer la passe. Ça commence fort !’ Et pendant toute la balade on pense au retour qui ne va pas être simple.
 
Vue du mouillage depuis la terre.
 

Les falaises de Pitcairn. Ca déferle au travers de la passe d’accès au môle de débarquement.
 
 
Une fois à terre et remis de nos émotions, nous sommes chaleureusement accueillis par Charleen qui nous offre à chacun un collier confectionné par sa maman. Puis direction le petit bureau de l’immigration improvisé pour l’occasion (une planche sur tréteaux recouverte d’une jolie nappe, installée en plein air devant le hangar à bateaux et qui sera démontée aussitôt les formalités effectuées), où le représentant des autorités britanniques (mais Néo Zélandais) nous reçoit en uniforme, sans aucun doute enfilé quelques minutes auparavant.
 
Bureau de l’immigration

Nous sommes ensuite embarqués, pour le plus grand bonheur des filles et du nôtre, car la pente est raide et nos guibolles toutes molles, dans des super quads, aménagés de rangements et assises supplémentaires et surplombés d’un abri, pour gravir la route qui mène au village, invisible depuis la cote. Nous découvrirons vite que ce sont les seuls moyens de locomotion sur l’île car les seuls adaptés aux routes escarpées et transportables par cargos.
 
Moyen de locomotion unique à Pitcairn : le quad

Charleen nous dépose au village et nous propose avec beaucoup de discrétion ses services si besoin. « Call Charlene on channel 16 if you need something » nous dit elle en désignant sa radio dans sa poche. Et nous aurons de cesse de recevoir ce genre de proposition car tous ici communiquent par radio VHF, toujours utilisée malgré l’arrivée récente du téléphone. Pour visiter le musée ? Call Nadine, on channel 16 of course. Pour poster une carte ? No problem, call Denis. Il vous ouvrira le bureau de poste. Aujourd’hui nous sommes samedi ; la communauté étant des Adventistes du Septième Jour, les samedis sont fériés mais les habitants savent que les bateaux de passage sont tributaires de fenêtres météo souvent très courtes, alors ils sont prêts à nous ouvrir tous les services si besoin. Et lorsque nous leur disons que ce n’est pas nécessaire car nous revenons demain ils répondent d’un air dubitatif : ‘Ouh ! If the weather is good !’

Notre première visite sera de courte durée car nous devons regagner notre bord en même temps que l’équipage de Tikaï qui doit déjà repartir. Le retour fut très sportif comme on s’y attendait. Une fois à bord nous découvrons l’inconfort du mouillage : le bateau est ballotté dans tous les sens, malgré le fait que nous ayons laissé la grand-voile à deux ris pour en diminuer les effets. La fatigue de la traversée n’arrangeant rien à notre état moral nous songeons à repartir, peu motivés pour passer la nuit dans un tel inconfort avec l’angoisse de déraper, alors qu’un paisible lagon nous attend à moins de trois jours de mer seulement. Malheureusement c’est chose impossible sans avoir refait un peu de gasoil. Et pour cela nous avons besoin de l’assistance de la chaloupe des Pitcairnais qui est déjà mobilisée par Tikai pour le chargement de son matériel scientifique.

Débarquement de la chaloupe entre deux déferlantes

Mouillage houleux

L’affaire est réglée, nous resterons ici cette nuit et prenons rendez-vous pour demain matin avec Jay le pilote de la chaloupe. Et même si la nuit fut à la hauteur de ce que l’on craignait, nous passerons une superbe journée le lendemain, en visitant le village et ses divers services, ou lieux de pèlerinage sur les traces des révoltés de la Bounty, en compagnie de Torika, la fille de Charleen.
Nous verrons les lieux où se trouvaient la maison de Fletcher Christian et Maimiti, la tombe de John Adams, les restes de ce qu’une expédition sous-marine a pu récupérer de la Bounty. Chaque lieu ravivant le souvenir de notre lecture de la célèbre trilogie de Nordhoff and Hall, dont le dernier volet est entièrement consacré à l’épopée sur l’île de Pitcairn.

Le sommet de Pitcairn

Balade dans l’île en compagnie de Torika
 
L’école de Pitcairn où sont inscrits seulement 8 enfants
 
La cour de récré avec :
 
Accrobranches

Trampoline en pleine nature

Cabane dans les arbres
 
Le jeu préféré des enfants : grimper au sommet des banian trees.

Nous aurons quelques discussions sympathiques et intéressantes avec les habitants, en particuliers avec Nadine qui nous fera visiter le musée et qui aime à entretenir un certain mystère sur le mythe du devenir des mutins. « John Adams se serait contredit plusieurs fois dans son récit, il n’aurait peut-être pas dit toute la vérité », nous murmure-t-elle…

Ou bien avec la famille de Carol, mère de Charleen, qui nous accueillera pour le déjeuner et nous racontera les complications de la vie qu’implique une communauté aussi isolée, mais que tous souhaitent pourtant conserver. Nous repartirons avec un joli plat en bois confectionné par Carol, dont nous apprendrons en regardant au dos de celui-ci qu’elle se prénomme Christian. Nous avions passé une bonne partie de la journée avec cette famille et n’avions pas pensé jusqu’ici à leur poser la question fatidique : de quel mutin descendez-vous ? Carol nous apprend alors qu’elle fait partie de la 6ème génération des descendants de Fletcher Christian et que bien qu’elle soit mariée elle a gardé son nom de famille, étant bien consciente de sa valeur. La 1ère chose que font les touristes qui achètent de l’artisanat à Pitcairn, nous apprend-elle, est de vérifier si c’est fait par un descendant des mutins. Et le descendant le plus connu est évidemment celui qui a mené la mutinerie. Et de conclure en souriant : « Business is business ! »

Carol nous racontera la vie de ses enfants. Certains sont restés vivre à Pitcairn mais d’autres sont partis. Sa fierté demeure son fils unique : Daryl Christian, descendant de Fletcher Christian, 7ème génération, sillonne à son tour les océans … mais cette fois en tant que capitaine d’un grand yacht !

Il est déjà l’heure de repartir,  nous voulons regagner notre bord dès la fin d’après-midi pour ne pas se faire prendre par la nuit au cas où la manœuvre de la remontée de l’ancre s’avèrerait plus compliquée que prévu, car il est hors de question de passer la prochaine nuit au mouillage. La fenêtre météo est terminée, la houle et le vent reviennent dès ce soir.

Nous lèverons l’ancre en même temps qu’une petite brise évanescente. Déjà les à coups sur le guindeau sont violents. Nous regardons l’île de Pitcairn s’éloigner dans notre sillage, sous un soleil couchant avec beaucoup d’émotion. Nous réalisons, les jambes encore flageolantes des tribulations ‘pitcairnoises’, que nous venons de franchir une grande étape symbolique de notre voyage. Cette escale sera sans doute la plus courte de notre long périple mais marquera nos esprits plus que tout  autre.
 

 

 
 

 

lundi 15 juillet 2013

Des Galápagos aux Gambier


Par : Armelle.


 

Cap vers nos rêves

Après ces trois semaines de repos … Nous partons pour les îles de la Polynésie, cap un peu plus sud que prévu car nous voulons tenter l’île de Pâques. Nous nous retrouvons vite au près - bon plein mais l’équipage est en pleine forme et le moral au plus haut. Chacun retrouve son petit coin bien calé dans le bateau, quand la Coccinelle à la gîte tangue dans tous les sens, et que chacun reprend ses activités privilégiées. Pour les filles ce sera le plein de dessins animés, pour nous de lecture et de siestes. Nous nous régalons de notre pêche et des fruits et légumes qu’il faut malheureusement vite manger avant qu’ils ne se gâtent. Bref c’est une traversée comme les autres où le temps s’allonge et les journées se ressemblent. Cependant quelques signes indicateurs annoncent un changement : désormais le Soleil fait ses courses au nord, la Lune n’est plus menteuse, les Ourses ne viennent plus visiter le ciel la nuit et quand le Vent vient de Sud ça caille !… car nous sommes désormais dans l’hémisphère sud !

 


 

La pêche du Capitaine à côté d’une tentative infructueuse de bananes séchées

 
Changement de cap

Au cours de la deuxième semaine le vent adonne, la Coccinelle se redresse et l’équipage totalement amariné peut s’employer à des activités un peu plus dynamiques. Désormais plus d’excuses pour échapper aux diverses corvées délaissées depuis notre départ. Malheureusement le temps est toujours aussi couvert ce qui limite fortement nos sorties dans le cockpit.

Le vent se renforce à mesure que nous approchons de l’île de Pâques. Inquiet le capitaine étudie la météo et les possibilités d’abris qu’offre l’île. Mais après trois jours de tergiversations il faut se rendre à l’évidence, les conditions ne pouvaient pas être pires que celles annoncées : un fort vent de secteur nord doublé d’une forte houle de sud ouest. Nous décidons alors de changer de cap à seulement 170 milles de l’arrivée. Les filles répondent à la nouvelle avec une moue et retournent aussitôt à leur jeu comme si on leur avait simplement annoncé qu’il n’y avait plus de dessert pour aujourd’hui. Pour nous c’est la déconfiture totale, quelques heures auparavant nous nous réjouissions de cette escale, rêvant de fruits frais et de vin chilien et surtout d’une bonne nuit au mouillage devant les célèbres moais, et nous voilà maintenant à plus de 12 jours de navigation de l’île la plus proche, avec le moral au fond des bottes. Et pour bien enfoncer le clou une dépression vient nous chatouiller les haubans nous contraignant à passer trente heures à la cape.

 
Atelier fabrication de lunettes rigolotes, faut bien occuper nos petits matelots !

Le temps d’une sieste pour les parents et le carré devient un vrai cafarnaum

 
Traditionnelle bouteille à la mer avec dessins des filles et message du Capitaine. Les pronostics de chacun quant à sa destination finale sont annoncés, pour les filles c’est Dady et Nany qui la trouveront sur la plage de l’île d’Aix.

 
Relâche à Pitcairn

Heureusement nous aurons ensuite quelques jours de calme pour reprendre un peu du poil de la bête et retrouver la motivation pour tenter cette fois une relâche devant la célèbre île de Pitcairn. Et comme tout bon marin qui n’est satisfait que lorsqu’il y a du bon vent et dans le bon sens (à savoir jamais) nous pesterons vite sur cette pétole qui s’éternise et risque de nous faire manquer la fenêtre météo pour y faire escale. « Ça non ! » S’écrie le capitaine. « Une fois mais pas deux ! » Le réservoir de gazole est presque vide. Et celui-ci pris d’un coup de sang un matin monte le moteur hors-bord au cul du bateau afin de déhaler quelques heures la Coccinelle en quête d’une faible brise, que nous finirons par trouver et qui finalement nous mènera sous spi jusqu’aux abords des îles d’Henderson puis de Pitcairn, nous réconciliant par la même avec le Pacifique.

Nous jetons l’ancre dans la baie de la Bounty, « La classe non ? », après 27 jours de mer. Nous n’avons pas vu un seul bateau depuis plus de 20 jours et n’avons rien mangé de frais depuis plus de 10 jours.

Seulement deux jours d’escale nous seront permis par Eole dans ce lieu mythique qui malgré les conditions idylliques n’offre qu’un mouillage houleux et un débarquement scabreux. Et encore nous sommes chanceux, les habitants n’ont pas vu un seul bateau ce mois-ci à cause du mauvais temps (nous sommes le 29 juin). Pitcairn se mérite mais nous le savions et nous sommes plus que motivés.

Nous repartirons encore plus fatigués qu’en arrivant mais nos têtes pleines d’images, enrichies de belles rencontres et avouons le, fiers d’être venus jusqu’ici, juste pour faire un brin de causette avec les descendants des célèbres mutins de la Bounty. (cf. post sur Pitcairn)

 

Pétole

 

Première leçon de barre pour Camille au passage de l’île d’Henderson

 
Cap vers la Polynésie française

Cette fois c’est la dernière ligne droite, l’archipel des Gambier n’est qu’à 290 milles de celui de Pitcairn, une bagatelle pour nous qui sommes en mer depuis un mois. La météo s’annonce excellente et nous filerons bon train pendant trois jours, arrivant au petit matin du 3 juillet pour embouquer la passe à travers l’archipel des Gambier. Dès l’approche de l’île de Mangaréva, nous scrutons aux jumelles les bateaux du mouillage, en quête d’un petit ketch bleu, ami de notre Coccinelle et dont nous n’avons plus de nouvelles depuis deux mois, depuis que nous avons quitté les Perlas. « Tiens ! Il y a bien un bateau qui correspond au signalement. » Patience, nous nous rapprochons … « Oui c’est eux, c’est sûr ! ».  Et nous levons les bras répondant à leurs gestes. Nous jetons notre ancre devant le village de Rikitéa à quelques brasses de nos amis.

Nous apprendrons vite qu’ils ont passé 50 jours en mer depuis les Perlas et ne sont arrivés que depuis trois jours !

Lever de soleil

Les Galápagos, ou les îles qui ont changé le monde…


Par Armelle.

 


C’est donc par un (mal) heureux hasard, le cardan de la cuisinière qui a rendu l’âme, que nous atterrissons devant Puerto Vilamil, sur l’île d’Isabella ; l’île la plus occidentale des Galápagos, mais aussi la plus grande.

Par chance les démarches administratives se feront assez rapidement. Après un entretien avec un agent peu accueillant (mais dont les services sont obligatoires), nous pourrons descendre à terre dès la fin de journée et laisser les filles gambader joyeusement sur la plage et se faire déjà des amis. Je m’explique sur le terme peu accueillant : en guise de discours de bienvenue, cet agent (n’oublions pas que c’est la première personne avec qui nous entrons en contact depuis 10 jours) nous expose la longue liste des sites interdits, et nous demande ensuite de nous acquitter des taxes d’entrée (conséquentes et obligatoires évidemment) pour les Galápagos, déclinant cette fois la minuscule liste des sites auxquels ces taxes nous donnent le droit d’accès. Il termine enfin par ces mots, texto :

-          « Et si vous n’êtes pas d’accord, ou si vous n’avez pas les moyens, vous pouvez toujours reprendre votre route vers la Polynésie. »

C’est vrai, les Marquises comme les Gambier ne sont qu’à 2.400 milles. Ou l’île de Pâques, plus proche, à 1.900 milles ; une paille… Le ton est donné et différera peu pendant tout notre séjour.

 


 
Mouillage d’Isabella

 

Suivons le guide !
 


Village de Puerto Villamil
 
Ici les animaux sont rois, jusqu’à interdire l’accès au parc pour enfants car les iguanes y ont élus leur zone de nidification.
 
Rassurez-vous l’amertume que nous a laissé ce désagréable prélude est vite effacée par notre émerveillement  devant une faune riche et peu farouche comblant largement, par leurs joyeuses rondes autour du dinghy, le mépris clairement affiché des autorités envers les voiliers.
Et puisque l’on cherche à nous immobiliser, et bien nous resterons dociles et nous nous cantonnerons dans notre mouillage.
Ainsi nous prîmes le temps d’observer ce que la nature veut bien nous faire partager, autour de notre Coccinelle :
-          En s’émerveillant dès notre arrivée de la pêche des pélicans qui par dizaines tournoient tout en plongeant autour d’un banc de poissons à quelques mètres du bateau ;
-          En regardant les iguanes serpenter dans l’eau puis se dresser sur leurs pattes pour venir se sécher au soleil en crachant par les nasaux des jets d’eau de mer ingurgités pendant leur plongée tout en conservant une immobilité parfaite du reste du corps et ce, pendant des heures ;
-          En admirant le surf d’une otarie sur la vague, déboulant sur la plage pour venir d’un pas titubant se vautrer sur les quelques transats de la plage déjà tous squattés par ses congénères ;
-          En observant le vol d’une frégate, tout en tentant de comprendre le répertoire des possibilités de manœuvres qu’offre sa longue queue en fourche ;
-          En écoutant piaffer les flamants roses qui broutent inlassablement et avec frénésie, le bec dans la vase.

 

Playa del Amor


L’iguane est resté dans cette position pendant 3 heures, Camille a tenu 30 secondes. Quant à cracher de l’eau de mer par le nez…


…Camille préfère mettre son masque pour aller plonger.

 
 


 
 

Nous nous sommes étonnés de tout ce petit monde qui semble en complète harmonie avec son environnement, et ne parait nullement gêné par notre intrusion. Un équilibre que l’on devine fragile mais qui semble pourtant immuable. On imagine aisément que ces îles devaient être semblables lorsque Darwin y séjourna, en 1835. Et quand alors il observa cette même flore, composée de roches volcaniques parsemée de mangrove et de cactus, ainsi que toute la faune, composée d’insectes, volatiles, reptiles et mammifères, si particulières et si bien adaptées, faisant germer dans son esprit les bases de sa théorie sur l’évolution des espèces.

 


 

 

 
 
 
 
Ce fut l’occasion pour les filles d’apprendre quelques lois fondamentales qui régissent la nature, ainsi :

-          A chaque flore correspond un écosystème et la chaîne alimentaire qui en découle.

-          La notion de prédateur et de proie, et les techniques que chaque espèce développe, pour sa survie par la persistance du plus apte.

 
La palme du camouflage revenant à ces iguanes marins, à la mine patibulaire, qui arborent un manteau façon roche volcanique, nappé de chiures d’oiseaux.
 



La palme de la chasse sous-marine revient aux fous à pattes bleues.


 

La palme de la chasse en voltige revient aux frégates.

 La palme de la séduction enfin, car n’oublions pas que la reproduction est également un élément indispensable à la survie d’une espèce, revient aux crabes rouges et aux fous à pattes bleus. Nous n’avons malheureusement pas pu observer la danse nuptiale des frégates, qui à cette occasion  gonflent leur gorge d’un rouge flamboyant.


 

Trois semaines durant, nous nous régalerons de ce spectacle célébrant la vie tout autour de nous. A chaque descente à terre, nous croiserons tortues, raies, pingouins ou otaries, chacun rivalisant de grâce par leur aisance sous l’eau ; nous faisant presque regretter d’avoir perdu nos branchies et nos doigts palmés. Bientôt nous ressentons les effets de récentes mutations, nécessaire à notre adaptation, et passons d’une variété d’homo sapiens à une autre. Ainsi nous quittons pour un temps et sans regret l’homo faber-consumerus pour intégrer notre nouvelle famille celle des homo balader-contemplatus. Si si cela existe, et c’est très répandu dans les îles polynésiennes. Une des caractéristiques physiques majeures étant l’apparition d’un poil dans la paume de la main. On pourrait penser que ce poil est un handicap ; la preuve que non puisqu’il persiste !
 

 

Au fait savez-vous ce qu’est devenue la coccinelle des Galapagos ?...
Elle a perdu ces pois noirs !

 
 

Baignade avec les otaries
 



Portrait de famille
 
« Dis papa on peut inviter une copine à bord ? »

 
En France on a parfois un panneau indiquant : « Attention traversée d’élans sur la chaussée »,

A Panama c’était : «  Attention traversée de … caïmans sur la chaussée »

Aux Galapagos c’est plutôt : « Attention traversée de tortues géantes sur la chaussée… soyez patients ! »

 

Une toute jeune tortue géante qui doit avoir entre 10 et 15 ans. Les plus vieilles ayant 200 ans et pesant plus de 200 kilos.

 

 
Le mur des lamentations érigé par des forçats d’un bagne qui fut installé dans les années 50 par les américains. La construction de ce mur ne servait qu’à occuper les prisonniers.

 

 En route pour fêter les 4 ans d’Apolline à bord de My Halong, née le même jour que la petite Rose (3 ans plus tôt).

 

« Pfff ! Pas envie de partir mais le règlement c’est le règlement. »

 

 
Coucher de soleil sur le mouillage d’Isabela